Comment faire l’amour avec un Nègre sans se fatiguer (1985) de Dany Laferrière…
Le résumé de l’éditeur: Deux jeunes hommes dans la moiteur d’une chambre poisseuse de Montréal. Torse nu sur son divan, l’un écoute du jazz en philosophant. L’autre rêve de devenir écrivain. Il lit Baldwin, Hemingway, Miller ou Bukowski, et s’extasie devant l’appétit sexuel des jeunes filles sérieuses. Ensemble ils dissertent sur la beauté et l’origine du désir, sur la Blanche et le Nègre. Et ça fait des étincelles.
Machine à écrire, ruban neuf, papier immaculé : la vieille Remington 22 dégotée chez le brocanteur est riche de promesses… L’écrivain est en route !
On m’a conseillé de lire ce roman en pensant qu’il devrait probablement me plaire et déjà, ce titre, Comment faire l’amour avec un Nègre sans se fatiguer me séduit déjà. J’ignore qui est Dany Laferrière (oui je sais, j’ai quelques lacunes littéraires mais je me soigne). Je trouve l’occasion de lire cet auteur antillais canadien ou l’inverse alors je me lance.
C’est un petit roman, un premier roman et pourtant, sous les couches de nihilisme et de fainéantise et de sexe, il y a beaucoup dans ce roman. Dany Laferrière, comme beaucoup, font du narrateur, leur projection, un double écrivain dont on se doute qu’il est autant fantasmé que ce qu’ils sont vraiment. Il ne faut pas tout prendre ce qui est écrit comme reflet de la réalité.
J’ai aimé suivre les vicissitudes de cet auteur en train d’écrire son grand oeuvre, ses relations avec les femmes, son colocataire improbable. J’ai aimé en filigranes comprendre les rapports sociaux et raciaux des années 80 au canada, hommes noirs/femmes blanches où le sexe est une révolution pour lutter contre la hiérarchie des genres et des origines.
Comment faire l’amour avec un Nègre sans se fatiguer sans se fatiguer n’est pas juste drôle, c’est aussi réfléchi. Dany Laferrière explique avec justesse et de l’intérieur cette prégnance des inégalités qui, sans être explicite, sont établies de fait. L’homme noir qu’il est a fait son deuil de l’égalité et, par le sexe, tend vers un équilibre des forces.
Outre cette tranche de vie sociale je suppose un peu moins d’actualité de nos jours, l’auteur invoques les grands auteurs dans son genre, Henry Miller en tête. Hommage ou patronage, Dany Laferrière est incontestablement très cultivé mais il n’en fait pas l’étalage dans Comment faire l’amour avec un nègre sans se fatiguer ce qui démontre une certaine maturité.
Plus que ce roman, c’est cet auteur que j’ai été heureux de découvrir. Je me demande par quel autre roman je devrais poursuivre sa découverte et si vous avez une recommandation, je suis preneur.
Je l’ai lu à sa sortie dans les années 80, je me demandais si ça avait bien vieilli! Contente de voir que tu as bien aimé. Pour continuer avec l’auteur, je te recommande Le Charme des après-midi sans fin, ses souvenirs d’enfance en Haïti.
Merci Grominou, je me note ton conseil. En as-tu lu d’autre de Laferrière ?
Oui, j’ai lu aussi L’Odeur du café, également des souvenirs d’enfance, bien aimé aussi malgré un côté un peu fouillis, et Le Cri des oiseaux fous où il raconte sa dernière journée en Haïti avant son exil, intéressant malgré quelques longueurs. Ce que j’ai remarqué c’est qu’il peut y avoir quelques répétitions d’un livre à l’autre, il vaut mieux ne pas les lire de façon trop rapprochée.
Tu en as lu pas mal. Et je comprends ce que tu veux dire. Ses auteurs qui se racontent dans des romans semi-autobiographiques, ils peuvent vite se répéter.