77 (2019) de Marin Fouqué…
Le résumé de l’éditeur: Chaque matin depuis la rentrée, ensommeillés, mutiques, mal lunés, ils se retrouvent au point de ramassage – le grand Kevin, la fille Novembre, le Traître, les faux jumeaux, et puis lui. Aujourd’hui, il ne montera pas dans le car scolaire, il va rester seul au bord de la route, sous l’abribus, sous sa capuche, toute la journée. À regarder passer les voitures. À laisser son regard se perdre sur les terres du “sept-sept”, ce département vague entre Paris et la province, entre boue et bitume, où les villes sont de simples bourgs et les champs de mornes étendues de camaïeu brun. À se noyer dans les souvenirs d’avant l’été, quand le Traître s’appelait encore Enzo et qu’avec la fille Novembre ils formaient un trio inséparable.
Après avoir beaucoup aimé le style radical de Marin Fouqué dans G.A.V., Rentrée Littéraire Actes Sud 2021, j’avais très envie de lire son 1er roman, 77. Et là aussi, cet auteur m’a séduit.
77 (prononcez sept-sept) est un roman un peu moins ambitieux que son dernier, moins ample, mais cela ne veut pas dire que ce roman est commun. Bien au contraire. Un premier roman qui parle d’un gars assis toute la journée sur un banc d’abris-bus, c’est un exercice de style couillu. Et réussi.
Marin Fouqué nous immerge dans le milieu des cités, mais les cités dont le béton n’a pas encore tout recouvert. C’est le sud-sept-sept. Le contraste entre le comportement des personnages et là où ils vivent, en pleine ruralité, donne des situations cocasses et probablement pas très loin d’une réalité que j’ignorais.
77 est un roman très bien mené. Pas d’ennuie à l’horizon sinon pour les protagonistes avec le champ boueux d’un vieux paysan comme tableau de leur attente. L’antinomie du temps d’avant des villages français confrontés a cette génération de jeunes scolaires, sculptés dans le béton des cités voisines, avec leur lot de vulgarité, de dureté et d’âpreté est parfaitement décrit sans que ce soit une description sociale.
Marin Fouqué écrit un très bon premier roman et je retrouve un peu du style de Chuck Palahniuk, avec ce que j’appelle des ritournelles, une répétition des thèmes qui donnent une musique au style, style que j’adore. N’hésitez pas à vous lancer dans ce roman à la couverture de crapaud.