La vie devant soi de Romain Gary…
« Ajar, c’est quand même un autre talent ! » Un critique parlant de Romain Gary.
Comme souvent c’est avec un déficit culturel que je me lance dans une lecture et, bien que connaissant le nom de Romain Gary, je suis bien incapable de dire ce qu’il retourne de ses romans. Alors Émile Ajar, vous pensez bien ! C’est donc par hasard que j’attrape La vie devant soi, Prix Goncourt 1975, dans la pile de mes livres en attente de lecture.
Le résumé de l’éditeur de poche, ici : Signé Ajar, ce roman reçut le prix Goncourt en 1975. Histoire d’amour d’un petit garçon arabe pour une très vieille femme juive : Momo se débat contre les six étages que Madame Rosa ne veut plus monter et contre la vie parce que «ça ne pardonne pas» et parce qu’il n’est «pas nécessaire d’avoir des raisons pour avoir peur». Le petit garçon l’aidera à se cacher dans son «trou juif», elle n’ira pas mourir à l’hôpital et pourra ainsi bénéficier du droit sacré «des peuples à disposer d’eux-mêmes» qui n’est pas respecté par l’Ordre des médecins. Il lui tiendra compagnie jusqu’à ce qu’elle meure et même au-delà de la mort.
Ce que je savais avant la lecture, c’est cette incroyable mystification du système qui élève son auteur au rang de culte ! Il est à tout jamais le seul auteur à avoir reçu 2 fois le Prix Goncourt (je doute que l’Académie se fasse avoir une nouvelle fois). Mais Malgré ce prix, je ne me fais aucune illusion ou attente particulière car j’ai la fâcheuse tendance à penser que tout n’est pas clair dans l’attribution de ce Prix corporatiste. Et la lecture plus tôt de Rue des boutiques obscures de Patrick Modiano me laisse une impression sans saveur !
Ce qui me plaît dans ces oeuvres dont le contexte socio-politique et culturel a changé (et je n’étais pas né), c’est que je peux apprécier le roman comme une entité propre. Avec ce filtre, les chefs-d’oeuvre d’avant ne sont pas forcement ceux de maintenant !
Autant le dire tout de suite, La vie devant soi d’Émile Ajar (Romain Gary) est une vraie pépite. L’entièreté du roman avec la voix de Momo 10 ans presque 14, ses fautes de français, sa vision du monde, son amour et sa fidélité pour Madame Rosa, l’ancienne pute qui l’élève depuis ses 3 ans, les personnages marginaux et magnifiques de notre société, tout est parfaitement à sa place. La langue utilisée par Émile Ajar (Romain Gary) est incroyable de drôlerie et de finesse. L’auteur distille merveilleusement une émotion juste du début à la fin.
Une claque !
Mais la puissance, l’intensité de La vie devant soi va au-delà de ce petit théâtre du 6ème étage sans ascenseur. Cette vieille pute juive et ce Momo 10 ans presque 14, musulman. La portrait de ce couple improbable. Et tout est là ! Une juive et un musulman. En filigrane, l’Histoire ! Mais que cette rencontre est belle, élégante et douce !
Avec un tel degrés de justesse et d’humanité, La vie devant soi est un vrai bijou de littérature. Je le conseille ardemment ! C’est une magnifique surprise !
Livrepoche.fr, un livre, une poche…